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Pas de démocratie sans médias

En 5 mois, plus de 320 postes ont été supprimés dans les médias suisses, soit 65 postes en moyenne par mois. Deux employés du secteur des médias perdent leur travail chaque jour.

C’est la triste réalité d’une tendance délétère qui s’accélère dangereusement. Et aucun besoin d’une boule de cristal pour deviner la direction dans laquelle nous allons. Un article d’un professeur de sciences des médias en 2017, presque prémonitoire, nous explique ce qui pourrait nous attendre. Rodney Benson y relate ce qu’il se passe dans le paysage médiatique des États-Unis, avec une concentration des médias entre les mains de grands groupes ou de milliardaires dans une pure perspective de profit :

« Éliminer la concurrence afin de s’assurer un monopole local, réduire le personnel et comprimer les budgets, bourrer les pages de dépêches bon marché et maximiser la publicité. Tout récemment encore, celle-ci représentait 80 % du chiffre d’affaires de la presse écrite américaine, soit la plus grande proportion dans les pays occidentaux. »

Une anecdote illustre bien cette tendance. En 1986, le groupe de presse Knight Ridder gagne 7 prix Pulitzer pour la qualité de son travail. L’action de l’entreprise dégringole en bourse. Quand son directeur demande à un analyste de Wall Street la raison de cet effondrement, la réponse est claire : « C’est parce que tu gagnes trop de Pulitzer. L’argent consacré à ces projets devrait rester dans la case “résultats“. »

La suppression de postes qui touche notamment notre journal régional est un drame humain pour toutes les personnes concernées. Mais elle révèle également à quel point nos médias régionaux, ainsi que la qualité et l’impartialité de leur travail, sont menacés. Et à quel point le bon fonctionnement de notre démocratie est à terme menacé par la paupérisation de l’information. Le groupe socialiste a donc déposé au Grand Conseil, et fait passer avec une large majorité, une motion urgente demandant une action en deux temps.

Le premier pas, urgent, doit simplement, mais fermement, assurer la pérennité du financement d’ArcInfo. On peut en effet difficilement imaginer que les récents licenciements suffiront à enrayer la tendance. C’est ainsi être réaliste que de prévoir de nouvelles coupes, voire de nouveaux licenciements. Si le Canton veut éviter de perdre durablement ce capital journalistique humain, il doit prendre des mesures, et vite !

Parmi les aides possibles à court terme, nous pensons à l’offre d’un abonnement pour les nouveaux habitants ou jeunes citoyens pendant quelque temps et à la prise en charge de l’abonnement du titre à l’agence de presse nationale ATS-Keystone (environ 200 000 francs par année).

Il s’agira ensuite de réfléchir plus globalement à la pérennité de l’ensemble des médias dans notre canton et à la manière de garantir leur rôle d’intérêt public. Un système cantonal de soutien aux médias devra ainsi voir le jour, même s’il n’a qu’une vocation subsidiaire par rapport aux autres moyens de financement. Une piste prometteuse est celle d’un organisme public autonome chargé de soutenir les médias, sur la base de conditions légales claires et, par exemple, d’un contrat de prestations définissant leurs tâches d’intérêt public (couverture de la politique locale, culturelle, sportive, etc.).

Grâce au PS, la balle est maintenant dans le camp du gouvernement et on peut espérer voir bientôt arriver un projet qui permette de sauver des emplois, de préserver la qualité de l’information et de consolider notre démocratie.

Pas de démocratie sans médias

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